Le film de fiction Ennemi d’Etat, avec Will Smith et Gene Hackman, montre comment on peut cibler quelqu’un qui travaille à Washington D.C. ; Will Smith y joue le rôle d’un avocat à Washington, visé par une campagne de diffamation organisée par les membres d’une agence de renseignement américaine craignant qu’il n’ait des preuves qu’ils aient assassiné un membre du congrès. L’aspect le plus effrayant du film est l’accès immédiat à n’importe quel type de donnée sur les autoroutes de l’information (du compte bancaire de Will, à ses conversations téléphoniques, jusqu’à sa localisation exacte) et les moyens de détruire sa carrière et d’atteindre à sa vie.
Un organisateur de conférences pour investisseurs m’a un jour présentée, en demandant à l’assistance « Qui a vu le film Ennemi d’Etat ? La femme que je vais vous présenter a un jour été à la place de Will Smith dans la vraie vie ».
Will Smith dans Ennemi d’Etat
Un jour j’étais un entrepreneur fortuné, avec une belle maison, un business florissant et de l’argent à la banque. Le lendemain j’étais pourchassée, mes actifs professionnels saisis, subissant dix-huit audits et enquêtes, une campagne de diffamation dirigée non seulement contre moi mais aussi contre les membres de ma famille, mes collègues et les amis qui m’avaient aidé, et neuf années de poursuite judiciaire principalement focalisée sur ma personne et contre le groupe Hamilton. Pendant plusieurs années, ceux qui m’aidaient et moi-même furent soumis à de sérieux harcèlements physiques et mis sous surveillance, sous la coupe de forces en majeure partie cachées et malfaisantes. Des événements du type cambriolage, empoisonnement, filatures, les amis, collègues et famille auxquels on dit de prendre ses distances avec moi, la tête coupée d’un animal sur le seuil de la porte, et pire encore, tout ceci quotidiennement.
Les problèmes commencèrent à la fin de 1995 et évoluèrent rapidement pour finalement aboutir sur une enquête et une poursuite judiciaire en 1996. Les attaques directes et indirectes arrivèrent par vagues successives dont je ne compris le sens qu’au moment où nous commençâmes à dessiner la chronologie des actions parallèles visant la suppression du récit de Gary Webb sur le trafic de drogues à Los Angeles, et la chronologie des profits boursiers réalisés par les investisseurs sur la gestion des propriétés du HUD et par les sociétés de prisons privées telles que Cornell Corrections. Il y avait une guerre en cours pour les flux d’argent générés par le budget fédéral, entre ceux qui font de l’argent sur la structuration des communautés et une économie de paix, et ceux qui font de l’argent sur la faillite des communautés et par une économie de guerre. Quand les prix des bourses et le Dow Jones augmentèrent, la guerre économique augmenta en sauvagerie. Par exemple, une comparaison entre le traitement que le département de la justice fit du groupe Hamilton, une société qui aidait les communautés à se développer, et le traitement de la société Enron, une société qui a détruit de manière criminelle les retraites et les économies des communautés, en dit beaucoup sur les buts réels du système.
En mars 1995, la première vente des prêts du HUD pour un milliards de dollars, connut un succès conséquent. Cette performance surprit à la fois les circonscriptions du HUD et Wall Street. Le magazine Barron’s publia un article de Jim McTague le 10 avril 1995 intitulé Croyez-le ou non, le HUD fait quelque chose de bien pour les contribuables. Le succès de cette vente et les prix résultant, par l’ingénuité commune de la banque d’investissement et du logiciel utilisé, prirent beaucoup de monde par surprise. Cela conforta le sérieux de l’équipe du FHA avec le groupe Hamilton comme conseiller financier principal, comme leaders d’un authentique re-ingéniering, par opposition à ce qui me semblait qu’être des communiqués de presse provenant des bureaux de « réinvention » du gouvernement d’Al Gore et d’Elaine Kamarck.
Un début de problème arriva d’une réponse de Mike Eisenson, à la tête de la gestion de portefeuille d’actifs privés du fonds d’investissement d’Harvard. Mike, qui plus tard sera connu pour son rôle dans le financement de la société de pétrole Harken Energy de George W. Bush, était en charge des investissements d’Havard avec un membre du conseil d’Harvard, le président de DynCorp, Pug Winokur dans NHP, l’une des plus grosses sociétés de gestion immobilière dépendante du HUD. Alors que nous préparions une mise aux enchères du premier milliard de prêts, Mike prit mon appel au téléphone et me dit « Allez-vous faire voir ! ». Il m’expliqua tout de suite qu’il détestait notre méthode de mise aux enchères, puisque le seul moyen pour Havard de gagner les mises était de payer plus cher que les autres compétiteurs. L’une des raisons pour lesquelles cela posait un problème était que le NHP serait en compétition pour les prêts défaillants cédés et tenu aux standards de marché concernant ses frais de gestion sous peine de perdre les biens dont le prêt était transféré du HUD au nouveau propriétaire, lui donnant ainsi le droit de changer de gestionnaire.
La société NHP avait la réputation d’être le plus gros investissement réalisé par Mike. Pour faire de la plus-value, il fallait qu’il la vende avec une introduction en bourse. Ce qui signifiait que la NHP avait besoin de plus, et non de moins, de contrats avec le gouvernement.
La méthode de vente aux enchères que j’avais créée mettait en compétition des petits et grands investisseurs de l’immobilier, des prêts immobiliers et des obligations, et augmentait fortement la compétition, comparée aux pratiques habituelles. Cela faisait que le HUD attirait un nombre important de nouveaux investisseurs dans l’acquisition des prêts défaillants et ainsi apportait de plus hauts taux de recouvrement sur ces prêts. Résultat, sur 10 milliards de prêts cédés grâce au groupe Hamilton, HUD a été capable de générer 2,2 milliards d’économies pour le fonds du FHA. Plus tard des audits confirmèrent que ces ventes de prêts eurent un impact positif sur les communautés dans lesquelles les biens étaient localisés.
L’un des aspects ironiques de la cession de ces prêts était que J. Roderick Heller III, PDG de la NHP, m’avait demandé qu’Hamilton commence à jouer le rôle de première banque d’investissement de conseil auprès de la NHP. Quand j’ai rejoint Rod et Mike au Club d’Havard au début des années 90 pour signer le contrat, ils essayèrent de modifier profondément les termes de l’accord et ont par essence, abrogé le contrat verbal fait avec Rod. Si nous avions continué d’aider la NHP tel que prévu au départ, nous n’aurions pas été le conseiller financier principal du HUD. Si le fait que nous aidions les régulateurs du gouvernement déplaisait au groupe d’investisseur d’Harvard, régulateurs dont dépendait leur plus gros investissement dans leur portefeuille, ils ne pouvaient s’en prendre qu’à eux-mêmes.
Un autre signe annonciateur des difficultés à venir : je commençais à recevoir des courriels étranges de la part de Tino Kamarck, le mari d’Elaine Kamarck, en charge du bureau de Gore sur la « réinvention » du gouvernement à la Maison Blanche. J’avais rencontré Tino, alors numéro 2 à la Banque Import Export et qui plus tard en devint le Directeur général, il travaillait à Wall Street mais je ne le connaissais pas bien. Tout d’un coup et par courriel, il s’exprima de manière étrange et inexacte sur mon mode de vie et mes habitudes, et me proposa d’avoir une aventure. J’ai pensé à l’époque qu’il avait d’autres motivations. Le sexe à Washington D.C. a rarement à voir avec, c’est un moyen usuel de manipulation et de basse politique. L’une des raisons pour lesquelles j’ai créé ma propre société furent les vingt minutes que j’avais passé à écouter Jack Kemp, Ministre au logement quand j’étais son secrétaire d’Etat adjoint, me demander de rallonger mes jupes. Cet entretien n’avait rien à voir avec mes jupes. J’ai pensé que c’était une tentative, certes vouée à l’échec, de me faire perdre mon sang froid. Je gérais l’argent du FHA trop proprement. Malgré ma proposition de changer de poste dans l’administration, Jack préférait m’obliger à partir de manière à ce que j’en sois tenue moi-même responsable.
Pour donner une idée du lien entre les événements, l’un de nos problèmes semblait venir de Jonathan Kamarck, qui était membre du personnel du sous-comité des attributions budgétaires du Sénat, un soutien important aux opérations « foyer sécurisé » du HUD et mal à l’aise avec l’impact que la vente aux enchères des prêts du HUD avait sur les intérêts immobiliers traditionnels. Jonathan me dit qu’il était le cousin de Tino et ainsi, apparemment proche à la fois de Tino et d’Elaine Kamarck. Au moment où les allégations contre le groupe Hamilton furent balayées, et que le fond d’Havard avait fait de larges profits sur leurs investissements liés au HUD, Elaine travaillait pour Havard et Tino pour une société immobilière de Boston qui avait des liens très étroits avec Havard et qui avait réussi à prendre un contrat avec le HUD pour réaliser des tâches similaires à ce qu’Hamilton faisait avant. Des années plus tard, je rendais visite à l’un des collègues de Jonathan au sous-comité du Sénat, qui avait été promu chef du personnel du président de ce sous-comité le Sénateur Kit Bond, et il me fit part de son sentiment selon lequel le « HUD était géré comme une entreprise criminelle ». Quand quelques mois plus tard le sous-comité mit en place une grosse augmentation du budget du HUD, je me remémorais ce que Bill Moyers, un ancien attaché de presse de la Maison Blanche avait dit un jour sur l’alliance entre la CIA et la mafia « quand on décide de tout laisser passer, n’importe quoi peut revenir nous hanter ».
Quand Andrew Cuomo devint candidat à l’investiture démocrate pour le poste de gouverneur de New York en 2002, il craignait que les électeurs ne l’assimilassent à la mafia.
(Photo www.loper.org)
La politique prit un tournant sérieux quand une personne du bureau de l’inspection générale du HUD indiqua qu’ils étaient en réunion avec Andrew Cuomo, alors Secrétaire d’Etat pour le développement local au HUD, et bientôt Ministre, et Susan Gaffney, Inspecteur Général du HUD. Cuomo indiqua qu’il était en train de s’organiser pour se débarrasser du groupe Hamilton et de moi. Il était considéré comme très proche d’Al Gore, et de son bureau à la Maison Blanche dans ses efforts pour « réorganiser le gouvernement ». En quelques mois, comme il fut me le fut rapporté par Nic Retsinas, alors Secrétaire d’Etat au Logement, la Maison Blanche lui avait ordonné de ne pas engager le groupe Hamilton pour les prochains contrats, un ordre auquel il a dit avoir dérogé. Plus tard, un cadre du secrétaire d’Etat à l’administration générale, nommé pour gérer le bureau des contrats du HUD, m’a confirmé cette information au sujet des directives données par la Maison Blanche.
Malgré ces directives données d’en haut, en janvier et avril 1996, un nouveau contrat et tâches seront assignés au groupe Hamilton pour le HUD et FHA sur une base de 10 millions de dollars annuels pour deux ans de contrat en tant que principal conseiller financier du FHA. Nos réussites (allant de contrats rentables décrochés avec le HUD et le FHA… aux analyses générées grâce à nos innovations concernant le logiciel et les bases de données qu’Alan Greenspan demandait sous forme de notes de la part de notre équipe d’analystes pour le personnel de la Réserve fédérale) surprirent ceux qui pensaient que notre utilisation de la technologie ne ferait pas une grosse différence dans les transactions du marché, les résultats financiers et les orientations.
C’était une période de risque et de transition pour beaucoup de monde. Dillon Read et John Birkelund se remettaient de l’un échec impromptu d’un investisseur principal dans leur société, la Barings. Après avoir aidé les associés de Dillon à racheter la société des mains de Travelers en 1991, la Barings fit faillite suite à un scandale en Asie au début 1995. Avec Dillon en investisseur principal, la société Cornell Corrections perdait de l’argent. L’ancien Directeur général et Directeur financier de Dillon, Nick Brady expérimentait les difficultés allant de pair avec le lancement de sa propre société, Darby Overseas Investments, Ltd, Washington, D.C. L’équipe des Clinton se demandait ce qui pourrait bien leur arriver si l’arrivée des républicains au congrès aux élections de 1994 se traduisait par leur renvoi aux élections de 1996. Les revenus de Mike Eisenson étaient contraints par la publication des salaires payés par le management d’Havard et c’est seulement plus tard que lui vint l’idée de lancer sa propre société (avec, rendez-vous compte, un contrat du management d’Havard de 10 millions de dollars annuels, le même montant que celui du groupe Hamilton avec le gouvernement). On peut se demander ce qui se passait dans les coulisses à la CIA et au département de la justice après la fin en 1995, du mémorandum sur les modalités des accords entre eux. On peut supposer que cela a laissé la CIA dans l’obligation de rendre compte de tous les trafics de drogues à la justice, et pour le département de la justice, que la CIA remplisse bien cette obligation. De ce fait, le niveau de transparence que le groupe Hamilton permettait d’atteindre avec ses outils informatiques pouvait augmenter de manière importante les risques judiciaires de la CIA, du département de la justice et de leurs sous-traitants. Quand les gens ont peur ou qu’ils sont entrain de gérer de plus grands risques, ils sont parfois jaloux du succès d’une start-up et se sentent coincés par leur incapacité à obliger directement les nouveaux venus à suivre les habitudes du marché, sans parler des liens de subordination cachés et les flux financiers illégaux.
Au printemps 1996, j’assistais à un dîner à la Conférence Nationale au Logement avec Scott Nordheimer, un promoteur lié au HUD en relation d’affaire avec le Bureau fédéral des prisons dépendant du département de la justice. Scott était sorti récemment de prison, suivant une condamnation pour fraude sur des obligations, et pensait que le futur pour nos services de bases de données se trouvait dans les prisons. Il essaya de manière très persistante de me persuader que les opportunités dans ce domaine étaient importantes, en comparaison avec les opportunités de création d’emplois de notre modèle de développement des communautés, qu’il disait ne pas être dans la bonne ligne politique. Quand je refusais ses invitations pour rencontrer le Bureau fédéral des prisons, je suppose qu’il a passé outre et a donné au département de la justice notre business plan. Scott fut rapidement très fructueux dans le programme VI du HUD. C’était un sujet à controverse puisque le HUD expulsait les occupants qui avaient des casiers judiciaires tout en laissant l’immeuble être la propriété et sous la gestion de partenaires avec un ancien détenu à sa tête.
Au dîner fin du printemps de 1996, Scott avait l’air assez content de lui et m’expliqua qu’on avait pris la décision de me piéger et que j’étais dans de beaux draps. Il me dit « bref, on a essayé de te virer par le biais de la Maison Blanche mais ça n’a pas marché, donc maintenant les gros bras se sont regroupés et ils ont décidé de t’envoyer en prison ».
Avec les autres membres du conseil d’administration du groupe Hamilton, nous avions été extrêmement prudents dans la manière dont nous avions construit et géré notre société. Nous avions vu d’autres sociétés recevoir des coups bas au sein du gouvernement, et nous avions fait tout notre possible pour nous assurer que nous pourrions supporter des audits tordus ou falsifiés et des enquêtes de type politique. Je répondis aux prédictions amères de Scott « Cela ne marchera jamais, Scott. Nous n’avons aucune casserole ». Scott me répondit « Tu ne comprends pas. C’est dans les tuyaux. Il n’y a rien que tu puisses faire ». C’était la première fois que je sentais que quelqu’un ou un groupe de personnes avait fortement envie de me voir croupir dans une cellule, et une partie du problème était d’ordre personnel.
Le 6 août 1996, la société Hamilton reçu sa première assignation, ce n’était que le début de la guerre des assignations lancées par l’inspecteur général du HUD (qui faisait une enquête à la demande du département de la justice). A cette époque, je ne savais pas que le département de la justice tenait des entretiens privés dans la cour de justice fédérale suivant une plainte « qui tam » datant de juin 1966 provenant d’Ervin & Associés, dans laquelle Hamilton était faussement accusée de délits civils et pénaux. L’enquête était conduite sous le prétexte d’une procédure « qui tam », c’est-à-dire qu’un tiers privé, s’assignant le rôle de chasseur de prime pour le gouvernement, cherchant ainsi à se payer 15 à 30% des dommages récupérés par le gouvernement (qui pouvaient tripler), sur le dos d’un autre tiers coupable d’avoir fait de fausses déclarations auprès du gouvernement. La charge donnée au HUD de lancer les assignations était un moyen pour le gouvernement de contourner l’obligation de communiquer qui est visé dans la plainte « qui tam », incluant le groupe Hamilton.
Ervin & Associates a été créée par John Ervin, un ancien employé de la société de gestion immobilière pour le HUD appartenant à Havard. Ervin avait obtenu des contrats pour gérer des prêts immobiliers du HUD défaillants et co-assurés et en 1994, il obtint un contrat pour réaliser les bilans financiers pour les immeubles aidés par le HUD. A travers ces contrats, Ervin avait une rentrée de données sur les immeubles d’appartements privés, financés et aidés par le HUD. Dans un témoignage plus tard Ervin déclara qu’il était capable de citer des cas pesant plusieurs millions de dollars de dommages civils pour le HUD et l’OIG. En clair, il indiquait faire partie du business des opérations « foyers sécurisés » du HUD et de l’OIG. Tandis que le HUD se séparait de plus en plus de prêts immobiliers en les vendant, le business d’Ervin baissait. On peut supposer qu’à un certain moment, cela a pu diminuer sa capacité à générer des profits et revenus pour l’OIG.
La première assignation ouvrit une période de deux ans pendant laquelle je n’étais pas autorisée à connaître l’existence de cette plainte « qui tam » qui eut pour résultat l’anéantissement de ma société, et une période de quatre années durant laquelle je n’étais pas non plus autorisée à lire ou entendre les allégations contre ma société ou moi-même, ni de qui elles émanaient. C’était cinq ans avant que je n’eusse accès aux transcriptions des auditions judiciaires (hors la présence de mon avocat bien entendu) dans ce dossier. C’était huit années avant qu’Ervin et le gouvernement ne soient sommés de présenter des preuves pour tenter de prouver leurs allégations sans fondements, et avant qu’Hamilton et nos avocats puissent avoir l’opportunité de rejeter ces fausses charges devant une cour de justice, assez pour en finir avec la campagne de diffamation faite contre moi en tant que banquier sur le marché financier. Pendant cette période, l’inspecteur général du HUD et des tiers ont partagé certaines de ces allégations supposées tenues sous scellés, de manière régulière, avec la presse et des membres du Congrès.
Jack Kemp annonce sa candidature pour la Vice-Présidence, le 10 août. Le récit de Gary Webb Dark Alliance dans le San Jose Mercury News apparaîtra huit jours plus tard.
Quatre jours après notre première assignation, le 10 août 1996 Jack Kemp, Secrétaire au Logement (HUD) quand j’étais son secrétaire d’état adjoint, annonça qu’il était candidat républicain pour la Vice-Présidence. Jack était perçu comme quelqu’un capable de persuader les femmes et les minorités de soutenir un ticket républicain. La réalité et la philosophie de Kemp ainsi que son parcours, étaient beaucoup plus sombres et beaucoup moins ouverts. Au début et à la demande de mes avocats, je devais plus tard illustrer quelques-unes de mes expériences avec la face cachée de Kemp, notamment ses efforts pour obtenir des subventions illégales pour un projet devant être développé par Andrew Cuomo quand ce dernier était avocat à New York cherchant de l’argent pour son père, Mario Cuomo qui était alors gouverneur de New York.
Huit jours plus tard, le 18 août 1996, le récit de Gary Webb parut dans le San Jose Mercury News, impliquant la CIA et au final avec la complicité du département de la justice, dans des trafics de drogue. Ces trafics de drogue avaient eu lieu durant la période des Iran-Contra quand Bush était Vice-Président et Oliver North employé en charge du Conseil de la Sécurité Nationale. L’un des proches soutiens et amis de Bush, Nick Brady et John Birkelund, associé chez Dillon Read, étaient alors les premiers banquiers d’investissement pour la société RJR Nabisco, laquelle était impliquée selon l’Union Européenne, dans le blanchiment d’argent sale pour des cartels de drogues internationaux et la mafia. Bill Clinton était Gouverneur, et Hillary Clinton, associée du cabinet Rose, en Arkansas, où une partie des revenus des opérations sur Mena étaient apparemment blanchis à travers l’agence locale pour le logement. Cette même agence de l’Arkansas fut finalement gérée par le gouverneur Clinton et conseillée pour ses titres obligataires, par le cabinet juridique Rose. Stanley Sporkin était à l’époque le conseiller juridique de la CIA à l’époque où le mémorandum avec le département de la justice fut rédigé. Si vous suivez la piste la plus probable des entrées et sorties d’argent de Mena, des opérations obligataires supposées de l’agence pour le logement de l’Arkansas, et les trafics de drogues ainsi que les prêts défaillants du HUD à South Central à Los Angeles, les allégations autour de ces événements et les actions pour les masquer qui suivirent, il y avait un lien étroit et désagréable entre les réseaux présentés dans le récit de Gary Webb, et ceux au pouvoir.
Je n’avais pas lu ou entendu parler des allégations de ce récit à l’époque. Les membres de mon équipe qui plus tard m’ont confié qu’ils avaient eu vent de cette histoire, ne m’en avaient pas parlé, ce qui montre la manière dont notre société est grandement compartimentée. Ils ne semblaient pas avoir vu le lien entre le danger qu’incarnait notre avance dans la réorganisation du gouvernement, ou dans la fourniture aux communautés d’un accès aux outils, logiciels et bases de données sur les ressources fédérales disponibles à chaque endroit, et la complicité du gouvernement dans le trafic de drogues et les fraudes du HUD qui entreraient dans le blanchiment des revenus.
J’étais sous une avalanche de travail liée à la gestion d’une société alors que je devais gérer aussi les assignations et une campagne de diffamation lancée au départ par une équipe de journalistes de l’U.S. News & World Report. Je n’avais pas noté au début du mois d’octobre que le Washington Post avait publié les « résultats » de son enquête « indépendante » au sujet des affirmations de Gary Webb, indiquant qu’il n’y avait pas assez de preuves soutenir ses déclarations. Je n’avais pas non plus conscience que, tandis que la Maison Blanche essayait d’en terminer avec mes contrats, Elaine Kamarck dans le bureau du Vice-Président Al Gore à la Maison Blanche, s’activait avec le procureur général du département de la justice, Jamie Gorelick, pour s’assurer que le secteur des prisons privées fasse son beurre avec des tonnes de contrats.
Alors que moi et mes collègues endurions de multiples assignations et campagnes de dénigrement, et que Gary Webb était défendait son récit au San Jose Mercury News (il devrait perdre son travail l’année suivante), Dillon Read faisait une déclaration auprès de la SEC pour l’introduction en bourse de la société Cornell le 17 juillet, pour le 26 août, 10 septembre puis 30 septembre avec un prospectus final enregistré le 4 octobre 1996. C’était de bonnes nouvelles pour Dillon Read et ses investisseurs. Grâce aux efforts couronnés de succès de l’administration Clinton, une nouvelle législation sur la criminalité assurait le soutien des bureaucrates du département de la justice pour sous-traiter la gestion des prisons fédérales à des sociétés privées, incluant un bouquet de contrats pour Cornell de l’automne 1995 au printemps 1996. Les actions de Dillon Read dans Cornell, achetées au prix de 2 à 3 dollars chaque, valaient 12 dollars l’unité, soit une augmentation de 400 à 600%. En plus de ces plus-values sur les actions boursières, Dillon empocha une grosse commission tout comme la banque d’investissement en charge de l’introduction en bourse. En neuf mois, l’administration Clinton avait augmenté le nombre de contrats et l’acquisition d’entités ayant des contrats avec 1726 prisonniers ce qui avait littéralement réalisé les profits de la société. L’introduction en bourse donnait une valeur de 24.241 dollars par prisonnier. Ce que cela signifie est que chaque fois que le HUD et son opération « foyer sécurisé » envoyait une équipe de paramilitaires dans une communauté, encerclant une centaine d’adolescents pour les arrêter, leur valeur sous-jacente pour les actionnaires des sociétés pénitentiaires gérant des sites et prisons pour les mineurs était de 2,4 millions de dollars. L’opération « foyer sécurisé » pouvait se permettre de supporter le coût de ses opérations facilement, suivant une forte augmentation des budgets alloués l’été et l’automne d’avant grâce aux plus gros soutiens au sein du congrès de l’inspecteur général de l’HUD : Jerry Lewis (Républicain de San Bernadino, Californie) Président du comité du budget de la Chambre, et le sénateur Kit Bond (Républicain, Missouri) Président du sous-comité des attributions budgétaires du HUD.
Tout ce qu’il manquait pour que la privatisation des prisons fonctionne était la suppression de la vérité, la vérité sur les personnes qui amenaient pour de vrai la drogue et pourquoi il était essentiel que les citoyens ne puissent pas voir et comprendre le dessous des cartes, comment l’argent fonctionnait dans les lieux où ils vivaient et résidaient. S’il y avait eu une carte des transactions réelles et de la manière dont l’argent travaille dans les communautés et au gouvernement, suivant les lignes de notre logiciel, alors que la plainte judicaire « qui tam » nous mettait en faillite, l’industrie des prisons privées n’aurait jamais pu prendre son essor. Si l’on pouvait illustrer la vraie criminalité ou le véritable gâchis économique dans le système, il était clair que les vrais escrocs et le vrai dommage économique n’étaient pas les gosses encerclés par les opérations « foyers sécurisés » du HUD, et pas non plus les propriétaires ni les employés du groupe Hamilton Securities.
Toujours prête avec le ton du moment, Hillary Clinton publia It Takes a Village avec Bob Rubin, Secrétaire du Trésor (et au moment où j’écris, senior chez Citigroup), au sujet de l’importance des centres urbains pour le développement économique. L’ancienne société de Rubin, la Goldman Sachs, l’une des plus grosse acheteuses des prêts du HUD, avait été l’une des plus grosses banques d’investissement de l’Arkansas durant la période « Mena ». Linda Ives a été la mère courageuse d’un adolescent de l’Arkansas qui avait été tué par la police en août 1987 quand lui et un ami ont croisé par hasard une livraison de cocaïne à Mena. Ives, avec la journaliste Mara Levitt, ont insisté pour faire la lumière sur plusieurs événements autour de la mort de son fils, au départ qualifié de suicide, et la corruption dans l’Arkansas. Ives pourrait vous dire que cela prend tout un village pour élever un enfant quand des leaders comme Hillary Clinton et Rob Rubin, leurs acolytes et collègues font de l’argent dans le voisinage.
J’ai découvert que, lorsque la situation semble être au plus bas, quelque chose survient qui peut transformer le cours des événements. Le 15 novembre 1995 le directeur de la CIA, John Deutch, fut confronté à des preuves de trafic de drogue de la CIA devant tout un parterre de citoyens et des média. Il était là pour parler des affirmations de Gary Webb décrivant la complicité de la CIA. La confrontation fut plus tard rendue célèbre par une vidéo du réseau d’information Guerilla appelée « Crack the CIA » et qui reçu un prix.
Deutch affirma devant la caméra que les affirmations de Webb feraient l’objet d’une enquête de la part de l’inspecteur général de la CIA, conduisant à des auditions parlementaires. Ces auditions comprenaient celle juste après que les bureaux et archives du groupe Hamilton aient été saisis par la justice.
Je passais deux années à résister aux attaques des forces terroristes et au harcèlement physique terrifiants, à la mise sous surveillance, avant que je ne visionne cette vidéo et que je lise le travail de Gary Webb. Ce fut à ce moment que j’ai commencé mon apprentissage, celui qui me permit de comprendre pourquoi la transparence financière sur les flux financiers transitant dans les quartiers était une menace suffisante à la stabilité et contre le système financier international, et pourquoi des intérêts puissants auraient pu insister pour que le groupe Hamilton et ses outils informatiques soient annihilés.